Emmanuelle-France

Je m’appelle Emmanuelle et j’étais parmi les 300 000 manifestant-e-s présent-e-s à Gênes en 2001.

J’ai été témoin de la violence policière et je considère que Vincenzo Vecchi et les 9 autres manifestant-e-s ne doivent pas être les boucs émissaire de cette répression d’Etat.

Vincenzo est sur le banc des accusés, je devrais donc être à ses côtés en tant que manifestante.

Le droit de manifester, d’exprimer ses idées n’est pas un délit mais un droit fondamental.

Je me déclare co-inculpée, je déclare avoir manifesté et je raconte.

J’étais déjà décidée à rejoindre le contre-sommet de Gênes lorsque les médias annoncèrent la mort de Carlo Giuliani. Il était alors encore plus évident qu’il fallait absolument s’y rendre, pour dénoncer les inégalités sociales mondiales, mais aussi la répression policière meurtrière qui s’exerçait à Gênes.

J’ai fait partie des 300 000 manifestant-e-s qui ont défilé le samedi 21 juillet 2001, au départ de la place Sturla, sur la via 5 Miaggio.

Le cortège était joyeux, paisible, multiple : enfants, parents, personnes âgées, jeunes, vache, cyclistes, … Mais rapidement la situation s’est tendue lorsque des gaz lacrymogènes ont été tirés depuis les hélicoptères.

Un mouvement de panique s’en est suivi, alors que les manifestant-e-s étaient coincé-e-s entre d’une part les bâtiments longeant le boulevard, et de l’autre le talus derrière lequel se trouvait la mer, avec des hommes arme au poing sur des zodiacs.

Je décidais alors de grimper ce talus, cherchant à m’abriter des tirs de grenades lacrymogènes.

Je me suis alors réfugiée dans une cage d’escalier, attendant que la situation se calme.

Il y avait là d’autres manifestant-e-s abrité-e-s au même endroit. Nous regardions les carabiniers déchirer les drapeaux, pancartes et autres restes de manifestation avec rage.

Le boulevard semblait un champ de bataille : sacs à dos, sacs de couchage, matelas abandonnés, … restes d’une énorme scène de panique générale.

Après quelques heures, je suis retournée sur le boulevard avec les autres manifestant-e-s, et j’ai quitté Gênes le plus tôt possible, traumatisée par ce que je venais de vivre. La rumeur courait qu’il ne fallait absolument pas monter dans une ambulance, même blessé-e, pour ne pas risquer d’être torturé-e.

J’appris ensuite les 600 manifestant-e-s blessé-e-s et l’évacuation sanglante, en pleine nuit, de l’école Diaz et les tortures et mauvais traitements infligés aux manifestant·es dans la caserne de Bolzaneto.

Je ne suis jamais retournée à Gênes.